Moment de bonheur immobile
02H 30
Je viens de me verser un café et je suis heureux ! Heureux de cette envie soudaine qui m’a pris il y a une demi heure : recommencer à écrire.
Sur la page qui précède le récit interrompu de mon voyage au Maroc puis le vide, hormis quelques lignes sur un autre cahier, et le récit très imagé, façon journal de bord, de mon séjour sur le Home 2 au mois de mai.
Brève interruption : jeu de freecell sur ordinateur.
Ecrire pour dire quoi ?
Je ne sais pas vraiment mais je suis heureux par le simple fait d’avoir eu envie de prendre le stylo et me retrouver avec ce contact physique avec le papier : une étrange jouissance, peut-être due au fait que j’interromps cette absence d’écriture, cet absence d’échange triangulaire qui va de Antoine à Antoine avec soi même par feuille de papier interposée.
Car il est vrai que ces mois ont été riches en vécu, riches en dialogues intérieurs, riches d’un étrange apaisement. Il est vrai que, de manière générale, j’écris plutôt dans les moments de tourments, lors de ces interminables questionnements autour de ma vie, de mes angoisses et de mes espérances.
Cette nuit ce n’est pas le cas : la sérénité me tient compagnie ; est-ce un calme avant la tempête ?
Oui, je le redis les mois que je viens de passer ont été assez riches car j’ai vraiment eu le sentiment de parvenir à un apaisement, de regarder moi-même et la vie avec un certain détachement.
Pourtant j’ai peu fait de choses qui habituellement me réjouissent : pas d’écriture, très peu de lecture et pratiquement pas de voyages. Et dans cette absence ma santé m’a fait aussi quelques tours avec un zona douloureux et long à partir.
Et pourtant. J’ose à peine l’écrire de peur que cela ne m’abandonne, ne me lâche.
Je ne sais pas comment cela se fait, mais j’ai le sentiment qu’un dialogue s’est instauré avec mon moi profond, mon moi divin. Non, je ne suis pas encore au face à face, mais quand j’essaye de vider mes pensées des diverses préoccupations terrestres, de les éloigner de mes soucis, de mes espoirs, quand je reste en attente de rien, je me sens envahir par la quiétude, la sérénité. Un sentiment de dilatation m’envahit, une foule de visages se présente à moi et il me parait de pouvoir tous les étreindre, les envelopper de moi-même, de pouvoir les contenir.
A ce moment de l’écriture je suis resté un long moment la tête entre les mains, mon âme vagant ou voguant selon le cas dans des espaces temps ou des espaces indéfinis. J’ai ressenti une forme de plénitude : et pourtant j’étais bien conscient de toutes les difficultés du monde, des méchancetés, des pauvretés etc.….
Je ne pouvais plus écrire et suis allé me coucher vers 4 heures.
Il est 8 heures au moment où je reprends cette page : je me sens toujours envahi par cette sorte de bonheur lucide.
Qu’y a-t-il de changé pour que j’en arrive là ? C’est difficile à dire mais il me semble que toute ma vie sociale se déroule dans une sorte de confiance avec l’autre, que mes amis je les aime encore davantage et plus simplement et que ma propre vie ne me tourmente plus.
Et pourtant il n’est pas un jour où le visage de ma fille ne me vienne à l’esprit et je m’interroge sur ce gâchis, mais au bout du compte j’ai comme la certitude que cela se terminera par un épilogue heureux, et cette conviction n’est surement pas une construction pour apaiser le présent.
Je ne sais pas si cet état est lié à mon parcours sur le chemin de la transcendance, mais il est certain que cela a accentué mes questionnements spirituels, que mon regard s’est sensiblement approfondi : mais tout était déjà dans ma vie.
Elle est passée par mille et un avatars, par mille et mille erreurs de toute sorte, par des joies matérielles toujours insatisfaisantes, mais j’ai eu la chance de ne jamais me noyer dans ce tourbillon même si j’avais mis en sourdine l’essentiel, du moins au niveau de mes pensées, pas forcément au niveau du comportement.
Quelqu’un veille sur moi, une vraie bonne étoile.
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