Amour au tournant d'une scolopendre (suite 8)

Publié le par antonio

Des mots, une histoire n° 62

de Olivia Billington

les mots imposés sont en bleu

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fougere scolopendrium     La mésange qui les avait accueilli à leur arrivée, la veille, avait lancé une trille bien matinale : cela avait suffit à convaincre Jean pour rejoindre le salon et tenter, en passant au peigne fin tous les événements de la soirée, de rétablir les connexions qui l’avaient conduit jusqu’à la nuit torride qu’il venait de vivre.


     En hâte, il avait rallumé la cheminée sentant sa peau, partiellement découverte, assumer rapidement la texture typique de celle de l’oie.


     Il avait fait couler un café bien fort, sorti des placards un pot de confiture de bergamote encore intact et disposé le tout sur la table avec des petites assiettes et du pain grillé Pelletier.

Marmellata di bergamotto            .. 

       Tazzina di caffé macchiato         

 

              Pain grillé Pelletier                      ..

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

     Assis devant ce petit déjeuner qu’il ne faisait que regarder, il profitait de l’absence momentanée de Marthe pour se laisser aller à une sorte de méditation d’où il ne parvenait pas à chasser l’image d’un diable qui, avec un sourire hermétique, paraissait lui dire qu’il paierait de son sang la nuit facile – mais Dieu qu’elle fut enivrante ! – qu’il venait de vivre. Par moment il avait l’impression que le prénom de Lucien se substituait à celui de Lucifer !

     Jean se secoua, comme à vouloir chasser toutes ces pensées et ces images, et avala la première gorgée de café. Il alla à la fenêtre : la neige, à la lumière de cet à peine jour, dégageait une sensation de tristesse quasi insoutenable accentuée par l’absence d’un quelconque bruit. Il retourna s’assoir à la table et avala une deuxième gorgée de café.


     Pour son malheur matinal, il avait eu le tort de tenter d’entrer dans le labyrinthe de la pensée de Marthe et, quoi qu’il tente, il ne parvenait pas à s’en sortir.

Ulysse entre Charybde et Scylla de J H Füssli     Pendant un bref instant il se reprocha de n’avoir pas su accepter cette nuit comme une passade aventureuse, mais ce ne fut qu’une fugace nanoseconde avant de replonger dans le parcours sinueux où chaque virage le faisait chavirer de la confiance béate à la déception noire, tel le malheureux Ulysse entre Scylla et Charybde.


     Par moment il ne savait plus s’il devait bénir ou maudire la coincidence étrange qui l’avait conduit jusque là le soir d’avant : l’immédiateté de la décision de Marthe et son apparente insouciance face à l’inconnu et même la bronchite de Lucien, n’étaient-ils pas les pièces d’une création machiavélique du diable pour le replonger dans les affres d’une vie qui reprenait, depuis peu, son cours paisible après tant de difficultés et d’adversités ?

     Jean se leva d’un bond comme effrayé par ses pensées ; il alla à la fenêtre et l’ouvrit : l’air froid et vif lui fouetta le visage, la cloche du village fit entendre neuf dong !

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E
<br /> On s’identifie aisément aux personnages. Surtout entre « labyrinthe » et « création ».<br />
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A
<br /> <br /> Merci Erika pour ta lecture attentives de divers épisodes: je pense que pour qu'un récit soit attachant pour le lecteur il faut qu'il y a toujours quelque chose dans laquelle s'identifier, choses<br /> et moments variables pour les uns et les autres.<br /> <br /> <br /> Mais on y arrive pas toujours.<br /> <br /> <br /> Amicalement<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> Ami Tonio,<br /> <br /> <br /> Me voici de retour en Alsace après une semaine bien pénible... mais enfin...<br /> <br /> <br /> Quant à Jean voilà bien longtemps que je lui ai conseillé de s'enfuir. J'ai laissé entendre que tout cela sentait le souffre et ai tracé des parallèles entre un Lucifer/Lucien absent en<br /> apparence, sa servante "Marthe" dont le feu couve en elle...et le feu (quelle que soit son origine).<br /> <br /> <br /> Pour la dernière fois...Jean enfuis-toi.<br /> <br /> <br /> Amicalement. FAJ<br />
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L
<br /> A mon avis Jean se pose beaucoup trop de questions! Et Marthe, qu'est-ce qu'elle en pense de cette nuit?<br />
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A
<br /> <br /> hello<br /> <br /> <br /> le prochain épisode nous le dira surement!<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Les interrogations de Jean sont pertinantes. J'aime beaucoup ton texte. <br />
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A
<br /> <br /> merci Ceriat<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> Article très intéressant. Bonne fin de journée<br />
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A
<br /> <br /> Merci Fethi<br /> <br /> <br /> <br />